Namibie : Trek dans le désert
Dans l’Afrique d’aujourd’hui, la nature a souvent cédé la place aux surfaces cultivées. En Namibie, pourtant, il est encore possible d’aller tâter du pied les espaces indomptés.
orsqu’on s’élance dans le bush namibien, il faut s’attendre à être interpellé par une végétation griffue et rebelle, au risque de transformer en guenille sa belle chemise safari. Mais marcher en Namibie, c’est aussi l’espoir de renouer avec la nature des premiers âges, des grands espaces qui ondulent vers l’infini, le rêve d’un cheminement au milieu de broussailles qui foisonnent de mufles, de naseaux humides et de cornes luisantes.
Le parc national de Namib-Naukluft – 50.000 km², rien de moins que le plus grand parc d’Afrique ! – fait perdurer le fantasme d’une cohabitation fraternelle avec l’animal. La protection de la faune et de l’environnement est inscrite dans la Constitution du pays.
Hélas, les animaux semblent encore trop souvent l’ignorer : le long des onze kilomètres de l’Olive Trail, les zèbres de montagne et les oréotragues, adorables petites antilopes au pied sûr, dévisagent l’Homo pedibus d’un œil inquiet avant de se carapater en quelques bonds à l’abri d’inexpugnables raidillons.
Il n’y a guère que ces braves damans qui se laissent approcher d’un peu plus près. Ces très lointains cousins de l’éléphant et du lamantin auraient tout l’air de charmantes marmottes, n’étaient deux incisives pointues à croissance continue qui confèrent aux mâles un étonnant sourire de vampire.
Le Namib cloue le bec à ce prétentieux de Sahara
Bivouac au pied du Spitzkoppe, le grand inselberg de la région du Damaraland
(Christophe Migeon pour L’Obs)
Pour un peu plus d’intimité animalière, direction les sables du Namib. Avec les déserts, il est d’ailleurs parfois préférable de se comporter comme avec certaines personnes : mieux vaut ne pas demander leur âge.
Le vent, qui n’est jamais le dernier pour colporter les grains de sable et les rumeurs, chuchote entre deux rafales un chiffre étonnant : 80 millions d’années, ce qui fait du Namib le vétéran des déserts. De quoi clouer le bec à ce prétentieux de Sahara qui, avec ses quelques centaines de milliers d’années, fait figure d’adolescent boutonneux.
Durant l’exténuante ascension de Big Daddy, l’une des plus hautes dunes de la région, on a le temps de ruminer les origines de cette mer de sable. Selon une séduisante théorie, le fleuve Orange aurait arraché ces montagnes de quartz au veld sud-africain, avant de les déverser dans l’Atlantique, où le courant de Benguela aurait alors pris le relais pour les remonter le long de la côte namibienne et les confier aux bons soins du vent.
En attendant, le soleil frappe comme un sourd. Les jambes sont en beurre fondu et la cervelle portée à ébullition a désormais la vigueur d’un ris de veau. Même les lézards Aporosaurus anchietae trouvent le sable trop chaud et tentent de se refroidir en dansant d’une patte sur l’autre.
La descente vers Deadvlei n’est guère plus rafraîchissante. Les ombres squelettiques d’acacias morts depuis 900 ans grimacent sur cette cuvette d’argile gercée de sécheresse. Leurs moignons de branches jettent sur le sol craquelé de longs doigts griffus prêts à se saisir du moindre souffle de vie.
Il en faut plus pour impressionner les corbeaux-pies qui y ont établi leurs gros nids inconfortables. Par cette chaleur, on peut supposer qu’ils n’ont même plus besoin de couver !
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