Les anges gardiens des montagnes
Chamonix. En hélico, à pied, à skis ou en raquettes, les super gendarmes des pelotons de haute montagne vont sauver des dizaines de vie cet été. Rencontre au sommet à Chamonix, berceau du secours en montagne.
Le matin, ils grimpaient à des arbres pour décrocher un parapentiste empêtré dans les branches. L’après-midi, ils étaient suspendus au milieu d’une falaise de 50 mètres, en train de brancarder une victime. Le soir, ils sont partis à la recherche d’un avion qui s’est crashé quelque part dans le massif du Mont-Blanc. Un exercice déjà corsé, mais devenu redoutable en raison d’une neige exceptionnelle tombée ce premier jour du mois de juin.
Bienvenue au CNISAG, le centre national d’instruction de ski et d’alpinisme de la gendarmerie à Chamonix. Là où sont formés les super-gendarmes qui vont intégrer les pelotons de gendarmerie haute montagne (PGHM). 250 candidats au départ chaque année. À peine 10 à l’arrivée rejoindront cette unité d’élite de 326 hommes. La formation ? 34 semaines pour maîtriser les aspects techniques. Mais des années pour apprendre la montagne. « C’est un milieu qui nécessite du vécu, du feeling. Il faut avoir connu tous les types d’intervention, par tous les temps, de jour comme de nuit pour être capable de gérer une opération complexe », résume le lieutenant-colonel Agresti, patron du Cnisag.
À Chamonix, le saint des saints des PGHM, les gendarmes ont effectué l’an dernier 1100 interventions, dont 900 dans le massif du Mont-Blanc où ils ont le monopole du secours. Ils tiennent à maîtriser le traitement de l’alerte : « C’est le point clé car en montagne, il n’y a ni route départementale, ni point kilométrique. Et puis il faut emmener le matériel idéal tout de suite », explique le chef d’escadron Estachy, patron du PGHM. La plupart des interventions sont héliportées, le point le plus éloigné du massif étant à 15 minutes d’hélico. Si les conditions sont trop mauvaises pour décoller, ils iront à pied, à ski ou en raquettes. Sans état d’âme et souvent au péril de leur vie. 52 gendarmes sont morts en montagne depuis 1958.
La mort fait partie de leur quotidien. 70 personnes sont décédées sur les pentes de Haute-Savoie l’an dernier. Et autant de familles à prévenir. Récemment, le fils d’une victime est revenu à Chamonix deux ans après un drame. « Je l’ai emmené sur les lieux où son père s’est tué. J’ai eu le sentiment qu’il est reparti apaisé », se souvient le gendarme.
Heureusement, il y a davantage de belles histoires. Comme cette jeune femme en bien mauvaise posture sur une paroi. Revenue sur la terre ferme, elle a embrassé fougueusement son sauveur. Un autre alpiniste, donné pour mort après une chute de 100 mètres lors d’un rappel, s’en est miraculeusement sorti. Plus tard, il s’est marié et a demandé au gendarme qui l’a secouru d’être son témoin.