Le Qatar en Palestine

L’émir du Qatar, le cheikh Hamad ben Khalifa Al Thani, débute une visite officielle dans la bande de Gaza à partir de ce mardi. Première visite au plus haut niveau depuis le blocus imposé après la victoire du Hamas aux élections législatives de janvier 2006, cet événement met autant en évidence la recomposition du champ politique palestinien que l’implication du petit émirat dans l’équation stratégique du Moyen-Orient.
Contrairement à ce qu’ont relaté de nombreux médias français et étrangers, ce n’est pas la première fois qu’un chef d’Etat arabe se rend dans la bande de Gaza depuis l’occupation de ce bout de terre par Israël en 1967. En 1999, ce territoire avait déjà reçu la visite d’un leader arabe. Il s’agissait déjà de… l’émir du Qatar.

Devenir le pivot du monde arabe

Cette deuxième visite s’inscrit dans un contexte radicalement différent de la précédente. En une décennie, le Qatar est passé du stade de petite monarchie pétrolière insignifiante à un acteur incontournable de la scène moyen-orientale.
Le moment choisi n’est pas anodin. Débordant d’ambitions, Doha a mis à profit la conjoncture issue du printemps arabe pour reprendre au Caire et à Riyad le leadership de la réconciliation interpalestinienne.
Avec une Egypte convalescente et une Arabie saoudite engluée dans ses querelles de succession, Doha a saisi l’opportunité d’occuper le devant de la scène sur un sujet qui domine les représentations du monde musulman. En février dernier, c’est à Doha que les chefs du Fatah et du Hamas se sont réunis pour signer un accord de réconciliation nationale.
Le Qatar souhaite engranger, par le biais de cette visite historique, les dividendes symboliques, politiques et médiatiques d’un engagement qui doit faire de lui, dans son optique, le pivot du monde arabe.

Avec les rebelles sunnites syriens

Le déplacement du cheikh Hamad s’inscrit également dans un contexte régional extrêmement volatile où la crise syrienne accentue les polarisations politiques et confessionnelles.
Soutien des rebelles et parrain du sunnisme régional, le Qatar s’est fortement engagé dans une ligne de faille qui est devenue la caisse de résonance d’un affrontement régional contre l’axe chiite qui s’étend de l’Iran au Hezbollah et dont la Syrie de Bachar el-Assad est un élément-clé.
Dans cet antagonisme qui menace la stabilité de toute la région et où le Liban semble malheureusement devenir la prochaine victime, chaque camp tente de mobiliser les ressources symboliques afin de légitimer son positionnement.
Dans cette compétition, l’alignement des factions palestiniennes (et du Hamas en particulier) sur la position qatarie gratifie la diplomatie du cheikh Hamad d’un précieux atout.
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