Le chef d’entreprise, c’est quoi?
Invité du Grand témoin-Le Figaro, Jean-Jacques Salaün, le directeur général d’Inditex en France, juge que l’innovation sociale aux services des salariés est largement possible.
Alors que de nombreuses enseignes peinent à trouver un accord avec leurs syndicats sur le travail du dimanche, les sociétés d’Inditex France (Zara, Bershka, Massimo Dutti, Zara Home, Pull and Bear, Stradivarius et Oysho) y sont parvenues. Leur directeur général, Jean-Jacques Salaün, détaille sa méthode. Et regrette les ambiguïtés de la loi Macron. Il livre ses recettes pour un dialogue social constructif et les innovations sociales qu’il a mises en place dans cette filiale du groupe espagnol qui emploie 8 500 personnes.
LE FIGARO. – Vous avez signé un accord sur le travail du dimanche et pourtant vous n’ouvrez pas votre magasin du boulevard Haussmann, à Paris, ce jour-là. Pourquoi?
Jean-Jacques SALAÜN. – Comme les enseignes voisines sont fermées, le boulevard Haussmann reste très peu fréquenté le dimanche. Par conséquent, il n’est pas rentable pour nous d’ouvrir ce jour-là. Or, l’accord que nous avons signé avec les organisations syndicales stipule bien que les magasins ne fonctionnent que si cela est rentable. Les partenaires sociaux ont compris cette exigence, les salariés aussi, qui sont rémunérés en partie par des commissions sur les ventes. Mais je regrette cette situation. Elle fruste nos salariés qui souhaitaient travailler le dimanche. L’ouverture des magasins sur le boulevard Haussmann devait être le symbole d’une libéralisation de l’économie française. Cela aurait amené des touristes et créé des emplois…
Comment avez-vous fait pour rallier suffisamment de syndicats alors que d’autres entreprises, comme la Fnac, n’ont pas réussi, ou alors peinent à avancer, comme les grands magasins?
Nous avons signé le 29 décembre dernier un accord avec la CFDT et la CFE-CGC. Comme FO et la CGT ne pouvaient pas s’opposer, n’ayant pas à eux deux 50 % des voix, il a été déclaré valide. Cet accord prévoit une rémunération à 110 % le dimanche, une récupération et des avantages pratiques. Nous avions trouvé dès 2009 un accord-cadre sur le travail du dimanche, qui nous a servi de base. Si nous sommes parvenus à un compromis, cela est dû au bon climat social chez Inditex France. Nous avons des organisations syndicales constructives, qui travaillent pour l’intérêt collectif. Cela est lié à culture humaniste voulue par le fondateur du groupe, Amancio Ortega. Plus le sentiment d’appartenance des salariés est fort, meilleure est la performance de l’entreprise. Pour moi, le chef d’entreprise doit être le premier représentant des salariés, il doit se sentir responsable de leur épanouissement professionnel et travailler avec les organisations syndicales dans le respect mutuel. Il doit aussi être exemplaire dans son comportement. Chaque salarié doit être assuré d’avoir un traitement digne et juste, afin d’être heureux de travailler dans son entreprise. D’ailleurs, ils ont tous mon numéro de portable et peuvent me joindre s’ils s’estiment lésés!
Source: LeFigaro.fr