Interview du directeur du Dubai Department of Tourism and Commerce Marketing (DTCM)

Le directeur du Dubai Department of Tourism and Commerce Marketing (DTCM) tire le bilan 2015 et annonce sa stratégie pour 2016. Il promet de ne pas oublier le BtoB.

Tour Hebdo : Quelle a été la fréquentation des Français à Dubaï en 2015 ?

Pascal Maigniez : Nous n’avons pas encore les chiffres officiels mais une tendance. Les arrivées des Français dans les hôtels ont progressé d’environ 5% à 7% par rapport à 2014. Une croissance presque inouïe au regard des résultats des autres destinations long-courriers et des destinations arabes. Je ne suis pas sûr qu’il existe une autre destination arabe ou dont la population est à majorité musulmane qui termine l’année en positif.

Alors comment expliquez-vous cette croissance malgré le contexte géopolitique peu favorable ?

P.M. : J’y vois trois raisons. D’abord, Dubaï est une ville mondialisée qui bénéficie dans l’esprit des Français d’une grande proximité avec le monde moderne. On a cherché à biffer certains traits, comme le fait que c’est une destination arabe, que la population y est musulmane… afin d’en faire une ville à part. Elle n’a pas d’équivalent hormis Abu Dhabi qui arrive juste sur le marché. A contrario, d’autres destinations plaisent pour leur exotisme mais sont les premières oubliées quand surgissent des problèmes sécuritaires. Ensuite, Dubaï n’attire pas que les touristes mais aussi des voyageurs d’affaires qui mixent business et loisirs en prolongeant leur séjour pour profiter de la destination. Et pour ce segment de clientèle, il n’y a aucune raison de ne plus aller à Dubaï. Enfin, les actions mises en place depuis vingt ans par le DTCM portent leurs fruits. Grâce aux nombreux éductours que nous avons organisés, les agents de voyages connaissent réellement la destination et en deviennent des ambassadeurs auprès de leurs clients. Notre programme de certification compte déjà 800 « Dubaï experts ».

Comment s’annonce 2016 ?

P.M. : Malgré la croissance en 2015, nous avons quand même eu un manque à gagner de 13 à 15 points car, sans ce contexte géopolitique, nous aurions enregistré une croissance de près de 20%. Je pense que ce manque va se reporter sur 2016, à condition que de nouveaux attentats ne se produisent pas.

Quelles actions prévoyez-vous en 2016 pour le BtoB ?

P.M. : Nous avons décidé de ne plus courir 25 lièvres à la fois. Donc, après avoir réalisé près de 150 opérations BtoB en 2015 tels que des roadshows, des présentations de brochures, des workshops et des formations, nous réduisons la voilure. Desormais, nous concentrons nos efforts sur les opérateurs qui enregistrent plus d’un millier de pax par an sur Dubaï et sur ceux qui sont importants sur le marché français mais pas encore à Dubaï, présentant donc un réel potentiel. A ces derniers nous voudrions faire comprendre qu’il ne faut pas rater le train face au développement de la destination, en particulier sur l’offre intermédiaire.

Cette réduction de voilure signifie-t-elle que le budget a baissé ou que vous comptez moins sur le BtoB ?

P.M. : Ni l’un ni l’autre. Nous n’abandonnerons jamais les acteurs du offline même s’ils ne réalisent désormais que 30% des ventes contre 70% pour les opérateurs online, un rapport qui s’est inversé en quatre ans ! Les acteurs offline sont des partenaires auxquels nous restons fidèles car ils participent au développement d’une destination en proposant aux clients une valeur ajoutée, tandis que le online se concentre sur la production mass market. Ils prouvent que Dubaï n’est pas qu’une succession d’immeubles et de centres commerciaux. Ils proposent des circuits hors des sentiers battus, montrent qu’une offre sportive n’est pas insensée et répondent ainsi aux attentes des Français, des clients particulièrement tatillons, en particulier sur le segment haut de gamme. Nous allons aussi continuer à faire découvrir la destination aux agents de voyages en renouvelant le mega famtrip que nous avons organisé en décembre dernier. Cette fois, ce ne seront pas 200 mais 250 vendeurs qui seront invités. Une opération comme celle-ci nous coûte près de 200 000 euros et mobilise une personne pendant trois mois et les cinq membres du bureau pendant deux semaines. Ce n’est pas rien pour nous !

Vos objectifs pour l’année à venir ?

P.M. : Séduire les femmes ! Nous avons remarqué que certaines d’entre elles ont encore un sentiment larvé d’insécurité vis-à-vis de la destination. Nous allons donc orienter notre communication en mettant en exergue le côté libéral et très sécuritaire de Dubaï, notamment en invitant des médias à rencontrer des femmes sur place. Par ailleurs, nous voulons augmenter la durée de séjour, qui est actuellement de 5 jours. Pour y parvenir, nous misons sur la baisse du prix de la nuitée grâce à l’accent mis sur l’hébergement intermédiaire et grâce à la diversification de l’offre dans la production des voyagistes. Enfin, nous voulons multiplier le nombre de repeaters par la multiplication des escales de croisières et des combinés avec des destinations de l’océan Indien et plus récemment avec l’Iran : les clients ont alors un teasing leur donnant envie de revenir.

Propos recueillis par Florence Brunel

Source: tourhebdo.com