Franchise en Algérie

La franchise a-t-elle un avenir en Algérie ? Oui, l’engouement d’une soixantaine de franchiseurs pour le marché algérien plaide pour. Peut-être non, car de multiples contraintes brident le développement de cette formule commerciale. Nombreuses sont les enseignes de marques étrangères visibles dans les artères principales de la capitale et d’autres villes du pays. Plus de soixante enseignes diverses sont présentes au Centre commercial et de loisirs Bab Ezzouar qui vient d’ouvrir. Que ce soit dans l’habillement, le cosmétique et le textile, la joaillerie, l’agroalimentaire, la restauration, la grande distribution…, ces marques sont présentes grâce à des vendeurs locaux agréés et sont accessibles aux clients soucieux de qualité, en quête de produits d’origine. 
Engouement croissant des franchiseurs étrangers
L’engouement des acheteurs, des consommateurs, pour la griffe étrangère, non contrefaite même si les prix restent élevés, est clair, suscitant l’intérêt des fabricants étrangers de ces marques. Un intérêt croissant durant les dernières années, motivé par l’attrait du marché algérien. Sans être exhaustive, la liste des enseignes présentes est assez significative : Quick et Hippopotamus pour la restauration rapide et grill, Dessange International et Yves Rocher pour la coiffure et le cosmétique, Springfield et Mango dans le prêt-à-porter, Guy Degrenne pour la décoration et arts de la table, Speedy pour l’entretien et la réparation automobiles… Ainsi, depuis 2003, des dizaines de contrats de partenariat en franchise ont été noués et plusieurs enseignes élargissent progressivement leurs réseaux de magasins ou de restaurants. De grandes marques de distribution spécialisée, notamment Ikea pour le meuble, ont également affiché leur intérêt pour une implantation directe.
La formule reste intéressante
Pourtant, la franchise reste encore peu développée en Algérie, à ses balbutiements, a contrario de la Tunisie et du Maroc où l’on compte plus de 400 réseaux de franchise. Certes, la franchise constitue une alternative réelle au commerce informel et à la contrefaçon, selon Me Hind Benmiloud, avocate d’affaires et membre éminent de l’Association algérienne de la franchise. D’autant que la traçabilité du produit, tant invoquée dans la rhétorique gouvernementale, est assurée complètement dans ce système commercial, constate- t-elle. De même, la franchise suppléée au déficit en grandes surfaces, en boutiques spécialisées. Comme la franchise contribue à la création d’emplois, au transfert de savoir-faire et à la formation continue, l’initiation au merchandising et la mise à niveau du capital humain et industriel. D’autant que cette formule est susceptible de créer des centaines de milliers d’emplois à moyen terme, notamment dans la franchise industrielle.
L’encadrement réglementaire manque 
Pour autant, des contraintes majeures brident le développement de cette pratique. La situation est loin d’être reluisante, assure Me Benmiloud. «Ce n’est ni rose ni noir», dira-t-elle, tout en réfutant que le départ de la marque de grande distribution Carrefour soit lié à ces difficultés. Après deux ans d’activité, Carrefour s’est retiré suite à la rupture des relations contractuelles le liant à son distributeur, argue-t-on. De même que la fermeture des magasins à enseignes Naf Naf, Celio ou Etam s’explique, selon la représentante de l’association, par des facteurs internes à ces marques. Ainsi, la franchise, essentiellement commerciale, n’est pas encadrée légalement et réglementairement en Algérie, acontrario de la Tunisie où une loi spécifique a été votée en août 2009. Cela même si le vide juridique n’empêche pas cette activité d’exister dans notre pays, quoique considérée uniquement dans le cadre de la vente en l’état de produits importés et d’utilisation de marques et licences brevetées protégées. Ainsi, le code de commerce organise la fonction de distribution, sans référence explicite à la franchise.
Le transfert de royalties reste problématique
Néanmoins, cette formule pâtit de difficultés d’ordre fiscal, notamment la taxation des bénéfices dans le cas de l’assistance technique, ainsi que de l’interdiction de versement de royalties aux franchiseurs étrangers, à cause de la réglementation contraignante des changes. Différemment du Maroc où le transfert libre des capitaux est permis, la Banque d’Algérie n’autorise l’exportation de redevances que si elles sont considérées comme liées à des prestations de services, ce qui n’est pas le cas de la franchise où il n’y a pas de transactions de flux réels. Cela même si le versement de redevances n’est pas exigé notamment dans la franchise de textile et que les franchiseurs et leurs franchisés choisissent le mode de paiement, selon des arrangements convenus. Or, ce problème (des royalties) tarde à être réglé, au grand dam de l’avocate d’affaires.
La franchise industrielle est possible mais… 
Concernant la franchise industrielle, le problème ne se pose pas puisque les conditions régissant l’investissement étranger, le commerce extérieur ainsi que la protection des brevets sont définies quoique coercitives. Toutefois, l’absence de production nationale réelle freine sensiblement ce mode commercial, a contrario du Maroc où déjà une cinquantaine de réseaux nationaux ont vu le jour. Et d’autant que le problème du foncier économique reste posé, ainsi que les contraintes de la garantie bancaire. Cela même si la franchise industrielle commence à émerger dans le domaine du médicament, l’agroalimentaire et l’industrie sidérurgique. Dans ce domaine, un réseau national de franchise a été développé par la société privée BKL, spécialisée dans la fabrication de fenêtres, et des jeunes promoteurs, avec l’appui d’une banque publique. En contrepartie d’un droit d’entrée, les promoteurs bénéficient de l’accompagnement de leur franchiseur et d’un accès facilité au financement.
 
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