Entretien avec Manu Wattecamps-Etienne
Le métier de marin pousse ceux qui le professent à vouloir connaître les secrets de ce monde disait Christophe Colomb. La Rando s’est entretenue avec le navigateur Manu Wattecamps-Etienne, un véritable amoureux des voyages et d’aventure ! Egalement membre de la team EXPLORE. Il prépare, en ce moment, un tour du monde, en solitaire et… sans escale. Découvrez l’entretien d’un Homme qui se consacre à ses passions dans un environnement qui lui plaît.
La Rando: En quelques mots, qui es-tu?
Manu Wattecamps-Etienne : Je m’appelle Manu Wattecamps-Etienne, j’ai 30 ans. Né en Bretagne et ayant toujours vécu près de la mer, j’ai appris à naviguer depuis mon plus jeune âge. J’aurais pu, comme beaucoup, choisir la mer pour embellir périodiquement ma vie, naviguer régulièrement durant mon temps libre, mais cela ne me suffisait pas.
A travers certaines lectures maritimes, à travers les navigations intensives que nous faisions avec mon père, toujours de plus en plus loin, je commençais déjà à m’imaginer naviguer de mes propres voiles un jour.
Puis j’ai eu 19 ans, mon baccalauréat dans la poche (tardivement mais honorablement!) et les portes de la Liberté se sont enfin ouvertes à moi. Cette année-là je prends une décision qui changera ma vie toute entière : je ne ferais pas d’étude, je naviguerais. Et une année après, à bord de ma petite Chimère, je largue les amarres, en route vers l’Aventure.
Dix ans plus tard, je navigue toujours, interrompant parfois mes voyages pour remplir la caisse de bord, ou préparer un nouveau bateau, mais jamais avec aucun autre but que celui de repartir naviguer.
Disons que j’ai l’intime conviction que la mer m’a appelé, que je suis né pour être marin. Je l’ai toujours su. Alors puisqu’on n’a qu’une vie, autant choisir celle qu’on aime !
La Rando: D’où vient ta passion pour l’aventure ?
Manu Wattecamps-Etienne : Je pense que c’est souvent quelque chose que l’on a en soit dès le départ. Certains ont besoin de se créer une stabilité dans la vie pour pouvoir s’épanouir. D’autres, au contraire, trouvent de l’excitation et du plaisir dans l’incertitude du lendemain, transformant leur quotidien en une succession de petites aventures. Je fais partie de cette dernière catégorie.
Mais pourquoi la mer ? Comme mentionné plus haut, mes lectures et mon père ont été les éléments déclencheurs de mon goût pour l’aventure. Lorsque j’avais onze ans, mon père acquérait Somaho, son premier voilier. C’est ensemble que nous avons découvert la navigation hauturière, nous lançant chaque année des défis plus importants au fur et à mesure que nos connaissances s’affinaient. En même temps, je découvrais les récits de voyages de Moitessier, des Damiens et de quelques autres. Des aventuriers, des vrais, dont la vie trépidante faisait palpiter mon cœur d’enfant. Désormais je le savais, je deviendrais « gitan de l’océan ».
Suite à quelques mésaventures, il m’est arrivé de me trouver sans bateau pendant quelques mois. Naviguer, découvrir, partir en quête de l’inconnu me manquaient terriblement alors. Un sac sur le dos et le pouce tendu, je prenais naturellement la route comme on prendrait la mer. Pour combler le manque…Un été tout autour de l’Europe ou un hiver jusqu’en Suède, je cherchais à chaque fois les sensations que me procure l’aventure sur les mers. J’ai aimé la route, mais il manquait… le goût des embruns.
La Rando: Quelle est l’expérience de ta vie que tu as préférée ?
Manu Wattecamps-Etienne : Question difficile ! J’ai aimé me sentir pionnier dans le Grand Nord, j’ai aimé me trouver minuscule face à l’impressionnante masse rocheuse du Cap Horn, sentir les parfums entêtants de la forêt Amazonienne et de son fleuve à bord de mon bateau, j’ai aimé les longues traversées de deux mois ou rien d’autre n’existe que l’océan tout autour, l’approche de la Skeleton Coast en Namibie et de ses rivages désertiques qui montent progressivement vers de hauts plateaux arides, mais j’ai aimé tellement d’autres moments aussi.
Avoir une préférence dans mes souvenirs et mes expériences me donnerait l’impression de délaisser tous les autres. Alors l’expérience de ma vie que j’ai préféré ? C’est La Vie toute entière.
La Rando: Quels sont tes projets ?
Manu Wattecamps-Etienne : Depuis mon retour en France, en Juillet dernier, je ne vis et ne respire que dans un seul et unique but : La Longue Route 2018. En hommage à Bernard Moitessier et à son incroyable aventure du Golden Globe de 1968, le navigateur Guy Bernardin a lancé un appel aux autres marins qui souhaitent se joindre à lui dans un projet de navigation plutôt osé : un tour du monde, en solitaire et… sans escale.
A l’heure ou j’écris Guy n’est plus parmi nous, l’océan l’ayant emporté alors qu’il ramenait son bateau en Europe Mais le projet reste et Guy aura réussi son pari : nous sommes déjà 23 inscrits aujourd’hui. Cet événement n’est pas une course. Car en soit, celui qui parviendra au bout de son rêve et qui aura su repousser ses limites aussi loin que nécessaire, sera considéré comme gagnant. Au-delà de l’exploit sportif, il y a une dimension spirituelle dans un tel engagement.
Passer 7, 8 ou peut-être 9 mois à dévaler les vagues, côtoyer les mers les plus dures du globe, dans une solitude absolue, voilà donc mon projet en cours ! Je prépare méticuleusement Céleste, ma fine coque en aluminium de 13m, pour ce départ tant attendu l’été prochain. En fait rien d’autre n’occupe mon esprit, c’est presque une transe ! Il faut être capable de tout prévoir, tout anticiper, car une fois parti en cas d’oubli ou de négligence je serais seul face à mes erreurs.
Alors en journée je travaille méticuleusement à la préparation du bateau (j’ai entrepris un important chantier pour un refit total!) et le soir je m’applique à chercher partenaires et financements pour le projet. Je vis deux journées en une, c’est parfois épuisant mais toujours excitant. En fait, quelque part, je me sens déjà en route et je dois avouer que j’en dors difficilement la nuit !
La Rando: A tous les membres de La Rando qui nous lisent et qui t’encouragent, quels conseils leur donnerais-tu pour réaliser leur rêve ?
Manu Wattecamps-Etienne : On a tous des rêves, qu’on les imagine accessibles ou pas. Un autre point commun entre nous tous est que l’on n’a qu’une seule vie. Et elle est tellement courte… Lorsqu’on a l’intime conviction que le rêve est beau, qu’il nous rendrait heureux, le plus gros échec d’une vie serait de l’enfouir au fond de sa mémoire. Bien-sûr, la vie n’est pas que Montagnes et Océans.
Mais un alpiniste qui ne grimpera jamais son rêve ou un marin qui n’a pas laissé la mer le prendre, peuvent-ils vraiment ressentir le bonheur de leur vie malgré le rêve étouffé ? Et un homme malheureux peut-il vraiment rendre son entourage heureux ? Je pense que rêve et bonheur sont intimement liés et qu’au moment où la vie s’arrête il sera trop tard pour se dire « si seulement j’avais »… La vie est une toile et les rêves sont de belles et éclatantes couleurs. Alors à vos pinceaux !
Vous souhaitez suivre Manu et sa monture Céleste ?
Manu Wattecamps-Etienne et sa monture Céleste s’élanceront en 2018 pour un tour du monde en solitaire et sans escale, en participant à la Longue Route 2018. http://www.longueroute2018.com/
Voici le lien de sa page de présentation http://alliancesail.org/blog/francais/manu-wattecamps/
Rejoignez-le dès maintenant dans cette aventure sur la page facebook de l’Association des Amis de Céleste! https://www.facebook.com/AssoCeleste/
Vous pouvez aussi l’aider dans la préparation de ce projet en participant à sa campagne de financement participatif sur gofundme (cliquez ici). En espérant que vous serez nombreux à nous rejoindre dans la réalisation de cet incroyable tour du monde!