Ces banques africaines installées à Dubaï
Les banques installées dans l’émirat s’intéressent de plus en plus aux PME africaines auxquelles elles offrent une large gamme de solutions.
Depuis que Reyl Finance a obtenu une licence de la part des autorités financières de l’émirat, à la fin de l’année dernière, Pasha Bakhtiar devine la première question qui risque de lui être posée : quelle est sa stratégie pour partir à la conquête du marché iranien, depuis la levée des sanctions économiques et financières ? Pasha Bakhtiar, né à Genève, chief executive officer de Reyl Finance, a passé plus d’une décennie à Dubaï. C’est lui qui a implanté localement Lombard Odier & Cie, la grande banque helvétique de gestion de fortune, en 2005, alors qu’il n’avait que trente ans. « Quand nous n’avions pas le droit de travailler en Iran, nous n’y allions pas. Maintenant que nous le pouvons, pourquoi bouderions-nous un pays qui offre de belles opportunités ? Toutefois, ce n’est pas l’unique objectif de Reyl Finance. Nous travaillons aussi sur les marchés du Moyen-Orient et de l’Afrique, en particulier de l’Afrique de l’Est », souligne ce diplômé de l’université de Washington.
Les Émirats arabes unis proches de l’Afrique de l’Est
Avant de rejoindre le groupe Reyl, Pasha Bakhtiar a même fondé et dirigé un fonds de capital-investissement axé sur les PME en Afrique de l’Est. Pourquoi ce choix ? D’abord, géographiquement, les Émirats arabes unis (EAU) ne sont pas si éloignés de la Corne de l’Afrique. « Ensuite, vous en connaissez beaucoup des régions aussi dynamiques, avec des taux de croissance pouvant atteindre 8 % ? » lâche le directeur de Reyl Finance. Membre des Young Global Leaders du World Economic Forum, Pasha Bakhtiar a choisi comme administratrice une… Saoudienne, Loulwa Bakr, rencontrée dans ce cercle prestigieux de 121 hommes et femmes de moins de 40 ans. À la National Commercial Bank, Loulwa Bakr suivait notamment des introductions en Bourse en Arabie saoudite.
Dubaï ne joue pas petit bras en Afrique
L’innovation ne s’arrête pas au recrutement de la première femme au centre financier international de Dubaï. Contrairement à l’Europe, l’émirat ne joue pas petit bras sur le continent africain. Une enquête sur le capital-investissement en Afrique montrait que dans 90 % des cas, les sommes allouées par les investisseurs du Vieux Continent étaient inférieures à deux millions d’euros. Ce n’est pas beaucoup pour un entrepreneur dynamique, qui veut se lancer dans l’agroalimentaire, les transports ou les technologies de l’information et de la communication. D’autant que le marché africain réclame des moyens souvent gourmands en capitaux. Comment pallier le manque de fonds propres ? Sachant également que les banques locales ne possèdent pas les compétences pour ensuite accompagner les PME dans leur développement, même dans les secteurs à fort potentiel de croissance.
Quand Dubaï est LA solution
En clair, si un chef d’entreprise installé en Éthiopie, au Mozambique, au Nigeria ou au Congo cherche cinq millions d’euros, ou davantage, c’est plutôt dans les banques établies à Dubaï qu’il va maintenant frapper à la porte. « Nos services ? Surtout dans les opérations de private equity, de placements privés de capitaux et de dettes. Nous nous intéressons à la fois aux entreprises et aux entrepreneurs, qui ne sont souvent pas la priorité des grands groupes bancaires », ajoute Pasha Bakhtiar. Si sa spécialité reste la course à pied (il a déjà couru le marathon en moins de trois heures), celle de l’avocat Yann Mrazek serait plutôt le basket. D’origine tchèque, ce géant de plus de deux mètres, installé dans l’émirat depuis une décennie, s’est spécialisé dans l’installation des particuliers, comme des sociétés, clés en main à Dubaï.
Une vingtaine de zones franches
« Je gère une implantation par semaine. Alors qu’au début, 95 % de mes clients venaient d’Europe, 70 % aujourd’hui arrivent de régions émergentes, dont 30 %, d’Afrique de l’Est et de l’Ouest. À Dubaï, il n’y a pas d’impôt sur le revenu, pas d’impôt sur les bénéfices, pas d’impôt sur la fortune. Et la compagnie aérienne Emirates totalise près de 300 vols par semaine sur l’Afrique », souligne Yann Mrazek, à la tête de l’étude M/Advocates of Law. Autre avantage, alors que dans les pays du Golfe, pour s’installer localement, il faut « s’associer à un sponsor local, qui détient au moins 51 % du capital de votre société, Dubaï a créé depuis 1985 une vingtaine de zones franches, Jebel Ali, Dubaï International Financier Centre, Gold & Diamond Parc, Silicon Oasis, Palm Island Development. Dans ces Free Zones, l’investisseur étranger peut détenir l’intégralité des droits sociaux de son entreprise. Pour faire simple : vous créez une société en Afrique, détenue par un holding logé à Dubaï, qui échappe à l’impôt, comme d’ailleurs son propriétaire. Mais dans ce cas, il n’est peut-être pas certain que l’optimisation fiscale contribue au développement du continent africain…
Source: Le Point